Depuis plusieurs semaines, la Gironde est victime de violents incendies qui ont déjà causés la destruction de plus de 20 000 hectares de forêts. Pompiers, bénévoles… nombreuses sont les personnes engagées contre les flammes. Pour les remercier, les épauler, les encourager, plusieurs professionnels de santé se sont mobilisés pour leur offrir des soins. C’est le cas de Sébastien Ballot, kinésithérapeute dans la commune de Landiras, en Gironde.

 

Les feux font rage dans votre région. Comment la situation évolue ?

Le feu a l’air enfin maîtrisé. La phase aigüe des évacuations est passée, nous avons pu rentrer chez nous mais nous sommes à présent dans un moment de vigilance essentielle qui va durer au moins jusqu’au mois d’octobre. Le sol a brûlé en profondeur et il y a une forte crainte de reprise de feu. Les pompiers ont besoin de l’engagement et de la solidarité de tous pour surveiller les bois.

 

Vous avez vécu les incendies au plus près, puisque vous faites partie des personnes qui ont dû être évacuées. Comment cela s’est-il passé ?

On nous a demandé de quitter le cabinet, car tout le village devait être évacué, à la fois pour des risques de flammes mais aussi à cause des fumées. Nous avons vraiment vécu les incendies de près, en étant obligé de fermer la structure de rééducation mais aussi de quitter notre maison. Heureusement, nous n’avons pas eu de dégâts, la priorité des sapeurs-pompiers étant de protéger les habitants et les habitations au détriment des bois. Il y a eu énormément de sinistres au niveau des espaces boisés avec de nombreux propriétaires qui ont malheureusement perdu beaucoup.

 

Vous avez pu être témoin de l’engagement des pompiers et bénévoles au contact des flammes. Quel a été votre ressenti ?

Je suis kinésithérapeute sur la commune de Landiras depuis 23 ans. J’ai fait le choix de travailler en milieu rural car c’est, selon moi, porteur de beaucoup de valeurs. La commune est à 35 kilomètres de Bordeaux et donc, petit à petit, la ville a connu une explosion de sa démographie. Nous avions tous la sensation que l’esprit village se perdait mais finalement, nous nous sommes tous trompés.

Face à un tel sinistre, il y a eu un élan de solidarité incroyable à tous les niveaux. Les gens du village préparaient des repas pour les pompiers, leur apportaient de l’eau fraîche, des collectes ont eu lieu, etc. Il y avait même des « volantes », des personnes qui allaient leur apporter des denrées directement au plus près du feu. Toute cette logistique s’est passée à la salle polyvalente de Landiras.

Quand on a dû fermer le cabinet et qu’on a vu toute cette solidarité au sein du village, ça m’a donné l’idée de mettre en place une structure à la salle polyvalente pour permettre aux pompiers d’avoir accès à des soins de kinésithérapie. Au départ, on a commencé par installer deux tables de soins et puis, finalement il y a eu un effet boule de neige et on a eu énormément de travail. On a dû soigner environ 20 à 25 pompiers par jour, donc sur une semaine, on a dû aider à peu près 150 pompiers.

 

Qui a été à l’initiative de cet élan de solidarité ? Qu’est-ce qui vous a poussé à vous mobiliser, à votre manière, dans le combat contre les incendies ?

L’initiative vient de moi-même. Cela fait tellement longtemps que je suis ici, quand j’ai vu tout ce soutien, je me suis dit que je pouvais peut-être apporter mon aide pour les soldats du feu.

Ce qui m’a inspiré, c’est l’esprit village auquel j’adhère depuis des années, j’ai fait un choix de venir travailler en milieu rural et il s’avère que depuis 23 ans j’ai une fidélité totale en cette ville alors que j’ai un tout petit cabinet de campagne. Depuis 20 ans, beaucoup de kinésithérapeutes se sont installés, ils ont pleins d’appareils de soins modernes et malgré tout, le gage de confiance persiste. Les gens du village sont des personnes très solidaires qui sont là pour aider les autres et vis-à-vis de ça, je ne pouvais pas attendre sans rien faire.

Il y a eu aussi un énorme soutien au sein de la profession. Beaucoup de confrères des villages voisins m’ont appelé pour apporter leur soutien, pour nous rejoindre le soir après leur journée de travail. C’était incroyable.

 

Quelles ont été les réactions des personnes que vous avez pu soigner ?

Les réactions ont été unanimes. Nous n’avons eu que des réactions positives, des remerciements alors que c’était nous qui étions là pour les remercier. Ils ont été surpris de l’engagement, de la solidarité.  

Les pompiers étaient très reconnaissants.

 

Quels sont les soins que vous avez le plus pratiqué pour aider les personnes ayant lutté contre le feu ?

Nous avons essentiellement pratiqué des levées de tensions sur les contractures dorsales pour ceux qui avaient d’importantes douleurs au niveau du dos. Nous avons eu également beaucoup de levées de tensions sur les mollets et les jambes car ils étaient souvent debout, fatigués, ils marchaient avec des bottes très lourdes. Il y a eu aussi pas mal de libérations vertébrales et articulaires liées à des soucis de postures.

 

Avez-vous un dernier mot à nous dire sur cet événement qui restera très certainement gravé en vous ?

On a fait tout ça avec notre cœur, on a été solidaires entre kinésithérapeutes ruraux. Je souhaite encourager tous les kinésithérapeutes à venir travailler chez nous. En milieu rural, le travail est différent, les retours des patients sont plus forts : ils sont fidèles, sympas, reconnaissants. C’est pour cela qu’après 20 ans d’activité en milieu rural, on ne se pose pas de question quand on voit des personnes dans le besoin. On a fait tout cela avec notre cœur.





Le Conseil national de l’ordre souhaite remercier tous les kinésithérapeutes qui se sont mobilisés et apporte son soutien à tous ceux qui sont touchés par les nombreux incendies qui frappent la France.

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